ALS - Magazine 7 - Avril 2020

32 / ALSMag Liberté et responsabilité du chercheur LA RESPONSABILITÉ DU CHERCHEUR La responsabilité du chercheur constitue la contrepartie nécessaire de sa liberté de recherche. Elle fait cependantdébats’agissantdes faitsgénérateursderesponsabilitéetde lasanctiondesaresponsabilité. On doit en effet d’abord se demander quels comportements du chercheur sont de nature à engager sa responsabilité : erreur, manquements à l’intégrité scientifique, exposition de personnes à des risques ? On doit ensuite se demander quelle est la sanction la plus adaptée. Doit-elle être prononcée par le juge ou bien par les pairs ? Le « syndrome de Galilée » 17 pourrait en effet dissuader le juge et le législateur de se saisir de la recherche scientifique de peur d’être considérés comme des censeurs. L’influence sociétale du chercheur Dans une société technologique, l’influence sociétale des chercheurs se renforce considéra- blement. Certes, le chercheur n’est que rarement détenteur du pouvoir juridique de décision qui appartient, stricto sensu , au législateur, au juge ou aux agences spécialisées. Pourtant, par la seule publication des résultats de ses recherches, le chercheur se trouve en mesure d’influencer les détenteursdecespouvoirs juridiques.S’iln’exerce pas un pouvoir juridique, le chercheur exerce donc un pouvoir factuel tiré de la légitimité de la science. Le pouvoir factuel a pour caractéristique de ne pas être explicitement attribué par une norme et de ne pas déboucher directement sur une décision juridique. Pour autant, l’exercice de ce pouvoir factuel 18 s’institutionnalise par la création d’organes chargés d’informer les titulaires du pouvoir juridique. Il en va ainsi de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’ali- mentation, de l’environnement et du travail (ANSES) dont les avis d’expertise collective, constitués le plus souvent de méta-études et de revues de la littérature scientifique, influencent aussi bien le juge que l’exécutif. Les avis de l’ANSES constituent d’ailleurs autant une source d’information pour l’État qu’un bouclier de protection contre l’engagement de la responsa- bilité de l’État en cas d’inaction face à un risque, dès lors que l’État aurait suivi la doctrine de l’ANSES, qu’elle soit fondée ou erronée. La loi n° 83-609 a institué l’Office parlementaire d’éva- luation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), composé de parlementaires ayant, pour certains, une formation ou une culture scienti- fique. L’Office auditionne des personnalités, rend des études sur saisine ou procède à des évalua- tions prévues par la loi. Ainsi, ces mécanismes institutionnels favorisent une certaine porosité entre le pouvoir factuel des chercheurs et le pouvoir juridique. Cette porosité des pouvoirs factuel et juridique pose question en cas d’erreur scientifique et en cas d’inconduite scientifique. LES FAITS GÉNÉRATEURS DE RESPONSABILITÉ DU CHERCHEUR Galilée Lunette astronomique deGalilée

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