ALS - Magazine 7 - Avril 2020
22 / ALSMag LES REFUS DE SOINS ÉMANANT DES PATIENTS ADULTES Le principe de l’inviolabilité du corps humain justifie la liberté du malade de refuser de se soigner. Il existe cependant des hypothèses dans lesquelles « le maintien de la santé publique justifie que soit refusée, dans certaines circons- tances, la possibilité du sujet de s’opposer à l’acte médical ». Il en est ainsi des vaccinations rendues obligatoires. On peut également citer les hypothèses dans lesquelles le juge peut soumettre la personne condamnée à une injonction de soins, celle-ci étant avisée que si elle refuse d’y consentir, l’emprisonnement prononcé pourra être exécuté. Enfin une admission en soins psychiatriques peut être prononcée à l’encontre de personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins, parce qu’elles compromettent leur propre sécurité ou la sécuritéd’autruietque l’ordrepublicestgravement troublé. Une injonction thérapeutique peut également être prononcée à l’encontre des personnes qui usent de stupéfiants. Mais, hormis ces cas, le refus de se soigner constitue bien une liberté fondamentale à la condition bien entendu que le refus soit certain et persistant au moment où le médecin est appelé à intervenir. Mais lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, l’urgence ou l’impossibilité légitiment une intervention du médecin. Depuis la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées qui sont évidemment révocables à tout moment. La Cour de cassation s’est penchée sur le point de savoir si un refus de soins pouvait être considéré PROBLÉMATIQUES SPÉCIFIQUES CONCERNANT LES MINEURS Traditionnellement, la relation médecin-patient a reposé longtemps sur un modèle « paternaliste » : le médecin, détenteur du savoir, prenait les décisions jugées adaptées pour assurer la préventionet le traitement,enrespectant leprincipe de ne pas nuire et de promouvoir le bien-être (serment d’Hippocrate : primum non nocere). L’évolution de la médecine, du droit, et des sciences humaines et sociales a été marquée par les évènements suivants : f les progrès scientifiques, les exigences de soins de qualité, la réflexion sur la recherche biomé- dicale, sur les soins à visée curative et palliative, sur les fins de vie ; f les droits des personnes malades à accepter ou refuser les soins, en exigeant de recevoir une information médicale précise dans un climat de confiance, leur permettant de faire part au médecin de leur consentement libre et éclairé (loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite loi Kouchner). L’évolution des considérations juridiques et médicales sur les fonctions parentales, les droits du patient mineur et son aptitude à comprendre les informations et à participer à la décision de son traitement, selon son âge et son degré de maturité. Il s’y ajoute la Convention internationale des droits de l’enfant (1989, ratifiée par la France en 1990) et la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale et l’évolution du Code de la santé publique ; f la place recommandée à la réflexion éthique dans l’organisation des soins émanant d’une médecine associant sciences et humanité. Refus de soins de santé comme fautif, parce que le refus de se soigner peut aboutir à une aggravation du préjudice subi et dont la réparation est demandée. La Cour de cassation ne l’a pas pensé. Dans son arrêt du 15 janvier 2015 numéro 13 – 21 180, la Première chambre civile de la Cour de cassation décide que le refus d’une personne, victime d’une infection nosocomiale dont un établissement de santé a été reconnu responsable, de se soumettre à des traitements médicaux, qui ne peuvent être pratiqués sans son consentement, ne peut entraîner la perte ou la diminution de son droit à indemnisation de l’intégralité des préjudices résultant de l’infection. En conséquence, elle casse l’arrêt d’une cour d’appel qui imputait l’aggravation de l’état du patient à son refus des traitements proposés, alors que ceux-ci n’avaient été rendus nécessaires que parce qu’il avait contracté une infection nosocomiale engageant la responsabilité de la clinique.
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