ALS - Magazine 6 - Septembre 2017

40 / ALS Mag Les matériaux et le vivant Alain Celzard, F. Cleymand, R. Kouitat et V. Fierro, Institut Jean Lamour, Epinal et Nancy Alain Celzard est professeur à l’Université de Lorraine, membre honoraire de l’Institut Universitaire de France et sociétaire de l’ALS. Il a fondé sur le Campus Bois d’Epinal une équipe de recherche de l’Institut Jean Lamour qui travaille principalement à préparer de nouveaux matériaux dérivés de ressources naturelles. servir de support à la croissance de ses propres cellules, ou des vecteurs qui soient capables de délivrer des substances actives au plus près des organes malades et avec le moins d’effets secondaires possibles. Ce qui semblait donc initialement être une association étrange : les matériaux et le vivant, apparait désormais comme un champ de recherches, de découvertes et d’inspiration immense. On peut en première approximation le diviser en trois grands thèmes, non exclusifs mutuellement, et aux frontières mal définies : les matériaux dérivés du vivant, les matériaux pour le vivant, et les matériaux vivants. Ils font l’objet des trois sections suivantes. Étant donné le nombre considérable de matériaux et d’applica- tions concernés, et la taille nécessairement limitée de ce chapitre, les aspects traités ici couvriront donc surtout, et sans prétendre à l’exhaustivité, les recherches poursuivies en région Grand Est. Le vivant est en effet capable de sélectionner les matériaux naturels qui lui sont utiles, ou d’en créer de nouveaux plus à son avantage en puisant dans les ressources naturelles et en les trans- formant. En fin de vie, les êtres qui ont su inventer de nouvelles matières en deviennent eux-mêmes la source en se faisant inertes, produisant ainsi des dépôts géologiques capables de bouleverser les paysages à l’échelle de millions d’années ou en fournissant immédiatement des matériaux à d’autres êtres vivants. En effet, un matériau servant par définition à une fonction – et par conséquent ne pouvant pas être choisi au hasard – l’Homme a su dès les origines trouver dans la nature les matériaux dont il avait besoin, dont plusieurs d’entre eux directement tirés du vivant et restés longtemps irremplaçables : bois, ramures et cornes, os, nacre, cuir. Récemment, l’observation appro- fondie de l’organisation du vivant a conduit à une nouvelle discipline : le biomimétisme. La sélection naturelle opérée par le vivant pendant des millions d’années a en effet conduit à des matériaux ultra-performants dont il est devenu possible de s’inspirer soit en en reproduisant les architectures aux différentes échelles, soit en imitant leurs voies de synthèse économes en matière et en énergie, soit en s’inspirant des écosystèmes. L’Homme, s’auto-réparant, s’est mis à rechercher tant des substituts qu’il doive bien tolérer que des matériaux qui puissent Le titre de ce chapitre peut, de prime abord, paraître quelque peu insolite. On imagine en effet d’un côté les matériaux, substances solides définitivement inertes, habituellement durables et dépourvues d’intention, et de l’autre le vivant en général, auquel on associe volontiers les concepts de complexité, d’évolutivité, et aussi de mortalité. Pourtant, à bien y regarder, les matériaux et les êtres vivants se côtoient depuis que la vie existe et se façonnent mutuellement.

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