ALS - Magazine 5 - Octobre 2015

32 / ALS Mag La poursuite de la numérisation sur ces trois composantes : communication, données et contenu. La numérisation du monde physique Sous le nom d’internet des objets, ou de cyber- physics, la numérisation du monde physique est en cours. Le monde physique se voit doté de capteurs pour le mesurer, d’objets intelligents et communicants pour traiter et transmettre les données et d’actuateurs pour agir dessus et le contrôler. Ces objets sont statiques ou mobiles portés par des véhicules, des humains, des robots ou des drones. Ils constituent une extension massive des réseaux de communication et créent étape par étape une doublure numérique du monde physique. Le monde des machines est lui aussi devenu communiquant, échangeant et interactif. L’ensemble constitue une forme d’ubis- phere où les hommes et les machines peuvent exercer leur sens ou leurs capacités de mesure à distance et après traitement agir ou interagir. Cet ensemble constitué de l’internet des objets, de l’espace machine to machine et des objets intelli- gents et communicants (smart phone et autres objets du quantifyself) est appelé par certains « internet of everythings » Le traitement massif et le croisement intelligent des données La quantité de données croit géométriquement avec le volume croissant d’objets communicants, la production massive de données issues des traces d’activité dans les réseaux et services, la surveillance du monde physique, le trafic « machine to machine » et la densification des topologies numériques d’interactions qu’ils permettent. Les données ainsi produites consti- tuent un matériau de plus en plus riche, dont on peut extraire des informations utiles, en elles- mêmes, pour la création de services, ou qui peuvent dans des étapes de croisement et raffi- nement successives produire des connaissances nouvelles. Ces connaissances font émerger une forme de miroir nouveau sur les activités sociales ou sur les comportements personnels. La première conséquence est de pouvoir enrichir des services existants par exemple par des approches de profilage pour aider, conseiller ou orienter et canaliser selon qui est en possession des données et a les moyens de les traiter. Mais aussi produire des services entièrement nouveaux comme la médecine prédictive, le diagnostic automatique, la médecine personnalisée. La deuxième conséquence réside dans le potentiel d’automatisation des processus de décisions. En réalisant la fusion de différentes sources, en utilisant les connaissances du passé et en appliquant des méthodes d’apprentissage automa- tique, il est possible de mettre au point des approches performantes de décision algorith- mique. Cela peut aller de la voiture autonome, au diagnostic de santé et à la prévention de la criminalité. Ces approches posent de nouveaux problèmes de nature éthique, sur la place de l’humain, et de la substitution de l’erreur machine à l’erreur humaine. . Mais quelles qu’en soient les évolutions et les trajectoires choisies ou subies, la métamorphose numérique va amener à la création d’une cybers- phère puissante de mesures, de traces, de traite- ments d’information et de décisions automatiques, génératrice de nombreux services nouveaux s’appuyant sur la richesse des données et la puissance des algorithmes. L’évolution et la maitrise de cette cybersphère constituant un enjoue éthique La création massive de contenus et de connaissances. Les instruments de création de contenus se développent permettant aux utilisateurs ou aux consommateurs du passé de devenir créateurs de contenu, de code, d’idée. Les réseaux permettent de les échanger, les partager, les annoter, les enrichir, créant ainsi de nouveaux contenus, points de vue, conseils et connaissances. Par ailleurs aux contenus du vécu, s’associent des contenus de fictions de plus en plus volumineux, imaginatifs et denses. De plus les jeux ou simulations vont permettre de les vivre et de les intégrer dans le patrimoine d’expérience des personnes. Va se former ainsi un monde riche de contenus et connaissance, avec les mémoires pour les stocker et les simulateurs pour les jouer, une forme de Noosphère, dans laquelle chacun pourra aller puiser, que chacun pourra alimenter, avec là encore le double effet de la rareté élective ou du block buster. Le développement simultané et l’interaction entre des trois mondes : ubisphère, cybersphère et noosphère, va enclencher la deuxième étape de la métamorphose numérique. En effet l’abolissement de l’espace par l’ubiquité sensorielle, du temps par l’accès au passé, la simulation du futur et la virtua- lisation du présent, vont permettre de créer un monde augmenté, un hypermonde constitué par l’association d’un double numérique du monde physique et des possibilités sans limite de simulation et de jeu offert par le virtuel. Tout cela n’est pas une vue de l’esprit, il suffit de regarder autour de soi, les impacts des jeux vidéo, les services de réalité enrichie, la force des fictions sur la perception du réel. Cette deuxième phase de la métamorphose va produire un être humain étendu, dans son indivi- dualité, dans ses liens sociaux, dans son industrie, d’un être déstructuré et restructuré. Elle doit amener à un questionnement épistémologique nouveau et fondamental sur l’individu, le présent, le lieu, la communication, la mémoire, la connais- sance, le travail, les interactions sociales. La métamorphose numérique Article > Francis Jutand

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