ALS - Magazine 5 - Octobre 2015
Article > Monique Grandbastien Faut-il enseigner l’informatique ou continuer à promouvoir l’utilisation des applications ? Il s’agit là d’un faux débat qui a conduit à des retards dommageables et donc il faut en sortir au plus vite, il faut évidemment donner aux élèves les bases de la science informatique comme on leur donne celles des autres sciences et leur apprendre à utiliser les applications les plus courantes. Il faut surtout les laisser pratiquer, créer, innover avec le numérique. « Il est urgent de ne plus attendre » titrait l’Académie des Sciences en 2013. Conclusion : Le numérique pour quelle école ? Pour aller plus loin, il ne faut pas se tromper de point d’entrée, la première question à poser est « quelle école pour former les citoyens de la société numérique, de quelles compétences ont-ils besoin pour leurs vies personnelle, publique et professionnelle ?» Et une fois les réponses explicitées « comment les avancées évoquées ci-dessus et celles que l’on peut envisager à court terme peuvent contribuer à l’atteinte de ces objectifs ? » Sans oublier que l’accès à la toile n’est pas encore complètement universel, il y faut entre autres des réseaux, de l’énergie, toutes choses qui sont loin d’être également réparties sur la planète. Comme tout progrès scientifique le numérique peut apporter le meilleur et le pire. Mais le numérique est une véritable opportunité pour l’école parce qu’il ouvre de nouvelles perspec- tives pour apprendre autrement, pour développer de nouvelles compétences. Il est un moyen précieux pour aider à répondre aux défis majeurs que l’École rencontre aujourd’hui : la réduction des inégalités scolaires, culturelles ou sociales, la lutte contre le décrochage, l’ouverture de l’École sur le monde. 16 / ALS Mag Le phénomène « MOOCs » Les premiers cours identifiés comme MOOCs ont été mis en ligne en 2012 et en fin 2014, on recensait 2400 cours et 16 à 18 millions d’étudiants inscrits. Pour la seule plate-forme française FUN, 400 000 participants se sont inscrits à 53 cours. Le New York Times a même qualifié l’année 2012 « The year of the MOOC ». Il s’agit donc bien de l’explosion d’un phénomène qui mérite d’être analysé comme tel. L’acronyme CLOM (Cours en Ligne Ouverts et Massifs) est peu utilisé et nous garderons donc MOOC dans la suite du texte. Des formations à distance, devenues formations en ligne, aux MOOCs La formation en ligne a peu à peu succédé aux formations à distance et s’est solidement et durablement établie dans le paysage des formations supérieures. Par exemple dès 2009, l’Open University britannique, l’un des plus gros opérateurs publics dans ce secteur, comptait 250 000 étudiants inscrits, dont 50 000 outre-mer. Ces formations proposent des cursus qualifiants ou diplômants, nécessitent souvent un dossier prouvant que le candidat possède les pré-requis demandés pour ce cours et le paiement de droits d’inscription. A côté de ces formations en ligne, le MIT aux USA avait lancé en 2001 un site de ressources (MIT OpenCourseWare) mettant à disposition les documents de cours, mais sans diplomation, ni accompagnement pédagogique et la plupart des universités prestigieuses ont suivi. On a parlé d’Open Educational Resources (OER) ou ressources éducatives libres (REL) ou encore en France d’universités Numériques Thématiques (UNT). Par ailleurs, au Canada en 2008, G. Siemens expéri- mentait un cours intitulé « Connectivism and Connective Knowledge » pour lequel a été créé la dénomination de MOOC (Cisel et Bruillard, 2012). C’est sur ce terreau fertile et avec comme déclen- cheur la crise économique aux USA obligeant les universités américaines à trouver de nouveaux publics et à offrir des formations bon marché qu’est né le premier MOOC de la vague actuelle. S. Thrun de Stanford a proposé son cours d’intelli- gence artificielle en ligne avec tutorat, sans pré-requis ni droits d’inscription, le succès – 160 000 inscrits - a largement dépassé les attentes – autour de 10 000. S. Thrun a immédiatement abandonné son poste au MIT et décidé de créer une société dédiée à la diffusion de MOOCs, Udacity était née. Deux autres professeurs de Stanford suivent fondent Coursera qui lève immédiatement 16 millions de capital risque fin 2013 la jeune société a noué de nombreux partena- riats pour diffuser les cours des plus prestigieuses universités du monde. A côté de ces deux entre- prises, le MIT et Harvard s’associent pour proposer la plate-forme edX à but non lucratif. Qu’est-ce qu’un MOOC ? Les quatre lettres du sigle sont importantes pour caractériser ce nouveau type de formation en ligne. Le C (course) indique qu’il s’agit bien d’un cours avec un exposé du contenu, des exercices, un suivi de la part de l’équipe enseignante, un calendrier de travail à respecter le plus souvent. C’est donc bien différent de la simple mise en ligne de ressources. Ces cours sont entièrement en ligne et ils sont ouverts, ouverts sans contrôle de pré-requis ni vérification à l’inscription, ouverts à tous âges et tous publics, sans droits à payer du moins pour le cours lui-même. Enfin le M signifie massif, c’est à dire s’adressant à des centaines ou des milliers d’apprenants simultanément, ce qui suppose à la fois une infrastructure et une organi sation qui le permettent. L’usage régulier des forums à la fois pour poser des questions et contribuer aux réponses en fait partie. La correction par les pairs est parfois utilisée, notamment lorsqu’une vérification automatisée du travail rendu n’est pas possible, le principe est que lorsqu’on soumet son devoir on en reçoit plusieurs autres à corriger avec des directives très précises d’évaluation, ces corrections font partie du travail demandé dans le cours. On parle de x-MOOCs pour des formations dans lesquelles le caractère transmissif reste dominant et de c-MOOCs quand le travail collaboratif est dominant. Le numérique a-t-il changé l’école ?
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