ALS - Magazine 3 - Janvier 2012
36 / ALS Mag ...Outre le temps perdu par les usagers, les externalités négatives du transport routier sont considérables, en termes de consommation énergé- tique, d’émission de polluants, de stress, d’accidents, d’usure des infrastructures, de coût écologique, etc. Dans un contexte de crise économique et de coût croissant de l’énergie (le baril de brut est passé de moins de 20 $ à plus de 100 $ en une vingtaine d’années), il apparaît comme nécessaire de gérer au mieux les infrastructures existantes. Et ce d’autant plus que les perspectives d’investissements importants dans de nouvelles infrastructures routières se sont réduites. L’objectif devient maintenant de rationaliser le système de transports et l’usage de la voiture dans une perspective de durabilité du système. La sécurité constitue un autre objectif essentiel qui peut être promu par des méthodes de gestion appropriées, parexemple larégulation de vitesse. La gestion des crises et des situations exceptionnelles (grands évènements par exemple) requièrent des méthodes de traitement spéci- fiques. Pour gérer et contrôler un système, il est nécessaire de le connaître, c’est-à- dire d’appréhender son état par des mesures, et de le comprendre, afin de prévoir les réactions du système aux actions de gestion, de régulation et de contrôle des opérateurs. Les modèles interviennent aux deux niveaux : ils permettent d’interpréter des données afin d’en extraire l’information utile, et ils permettent de quantifier la dynamique du trafic et de prédire l’impact sur celle-ci des mesures de régulation. Comment modéliser le trafic Les approches de la modélisation du trafic Il n’est pas possible de construire une « théorie du trafic » au sens par exemple des théories de la physique classique. Voici les raisons principales de cette difficulté : h Le trafic est un système complexe très non linéaire constitué d’un très grand nombre d’agents (conduc- teurs) et d’éléments (de l’ordre de plusieurs milliers de véhicules-heure sur autoroute). Ce nombre très élevé ne se prête pas à une description explicite basée par exemple sur une formulation analytique des interactions entre conducteurs. Le facteur humain ne permet pas d’envisager des lois exactes d’interac- tions entre conducteurs. h Le nombre des véhicules n’est cependant pas assez élevé, leur densité n’est pas suffisante, pour que l’on puisse appliquer les outils de la mécanique statistique de manière rigoureuse au trafic. Les modèles de trafic ne permettent pas de dégager des « lois universelles » du trafic. Chaque famille de modèles présente un champ de validité limité et est liée à un type d’application particulière. L’approche microscopique L’approche microscopique repose sur l’observation du comportement individuel des conducteurs. Des études nombreuses et approfondies du comportement des conducteurs ont montré que chaque conducteur prend ses décisions en examinant en un cycle court de quelques secondes une douzaine de points autour de son véhicule. Cependant, la dynamique des véhicules est largement expliquée par les lois de poursuite : l’accélération d’un véhicule suiveur dépend de l’angle et de la vitesse de variation de l’angle sous lequel son conducteur perçoit le véhicule qui le précède (Gipps 1981). Les conflits peuvent être décrits à l’aide de modèles d’« acceptation de créneaux », ce qui permet d’expliquer par exemple les règles de changement de voie, de conflits dans les convergents etc. (Treiber et Kesting 2006). De très nombreux modèles ont été développés et commercialisés à partir de ces idées (IDM, PARAMICS, AIMSUN, VIPER, VISSIM). Les problématiques de l’aménagement constituent le champ d’application privilégié des modèles microscopiques. Par contre ceux-ci se prêtent mal à la gestion macroscopique du trafic. En effet, compte tenu de la non-linéarité du trafic, l’agré- gation des comportements individuels d’un très grand nombre de conducteurs conduit à des dynamiques incorrectes à grande échelle, alors même que la dynamique à petite échelle est bien décrite. Il y a là une difficulté à rendre compte du comportement émergent à grande échelle dû à un problème de sensibilité aux petites erreurs du système dynamique que forment les véhicules. Article > Jean-Patrick LEBACQUE
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