ALS - Magazine 3 - Janvier 2012

26 / ALS Mag Les options de vente On considère le cas d’un industriel qui produit en France des objets destinés à être vendus sur le marché américain. Il lui faut un délai de trois mois pour réaliser une commande portant sur 10 000 pièces. Le coût de production d’une pièce est de 7 euros. Supposons que le taux de change euro/dollar du jour soit de 1 euro = 1,3 dollar. Ainsi si l’industriel vendait ce jour sa production il obtiendrait : 10 000 x 7 = 70 000 euros = 70 000 x 1,3 = 91 000 dollars. Supposons que l’acheteur américain passe com- mande de 10 000 pièces au prix de 91 000 dollars à la livraison. Notons que ce prix a été déterminé avec la valeur aujourd’hui du taux de change euro/ dollar. Mais ce taux a de fortes chances de varier. On considère deux cas possibles : dans trois mois le taux de change euro/dollar est 1 euro = 1,4 dollar ou 1 euro = 1,2 dollar. Dans le premier cas, pour une commande de 91 000 dollars, l’industriel recevra (en euros) à la livraison : 91 000 = 65 000 euros. 1,4 Le manque à gagner est de 70 000 – 65 000 = 5 000 euros. Ce qui est loin d’être négligeable. Dans le second cas, la situation est profitable à l’industriel. Pour se protéger contre une hausse du taux de change euro/dollar, l’industriel peut acheter 70 000 options de vente (puts) avec prix d’exercice de 1,3 (le taux de change du jour) et échéance à trois mois. L’industriel devra s’acquitter du paiement d’une prime lors de la signature du contrat auprès de l’établissement financier qui a accepté de couvrir ce risque. Trois mois plus tard, lorsque un euro vaut 1,4 dollar, en exerçant l’option de vente le producteur recevra exactement les 70 000 euros attendus. Le mécanisme du calcul est similaire à celui que nous avons détaillé pour les options d’achat. Dans le cas où le cours de l’euro baisse, l’option ne sera pas exercée mais c’est sans importance car dans ce cas l’industriel recevra 91 000 = 75 833 euros, 1,2 ce qui est plus que les 70 000 euros attendus. Ainsi l’industriel est parfaitement protégé contre une hausse du taux euro/dollar. Il faut toutefois souligner que cette protection a un coût, l’indus- triel a dû s’acquitter du versement d’une prime. On voit clairement que les options de vente sont des produits dérivés qui ne sont pas des produits spéculatifs. Ils agissent plutôt comme une assurance. Modélisation probabiliste La méthode que nous avons développée sur un exemple (p25, Les options d’achat) est très générale. Pour les marchés sans opportunité d’arbitrage, on peut montrer l’existence d’une probabilité qui rend possible le calcul du prix F0 des produits financiers libérant un flux variable F (par exemple une option de vente ou d’achat, une action,…) à une date future T. De plus F0 = la moyenne actualisée du flux aléatoire F. Cette formule très générale est intuitive. En effet dans un modèle probabiliste, on commence par déterminer l’ensemble Ω de tous les résultats possibles. Ensuite on affecte à chaque éventualité une probabilité. Il paraît en effet clair que certains événements sont moins fréquents que d’autres et seront ainsi affectés d’un poids plus petit que les événements fréquents. Ce qui permet de calculer la valeur moyenne (ou espérance) E (F) de F avec la formule : E (F) = Σ F(ω) Prob(ω), où la somme est étendue à tous les ω de Ω. Mais la quantité E (F) représente un montant à la date T. Selon le principe d’actualisation introduit (p24, Actualisation), la valeur actuelle nette est F0 = E(F ) 1 + r où r est le taux du loyer de l’argent pour l’inter- valle de temps [0, T] considéré. Le modèle probabiliste le plus utilisé est celui de Merton, Black et Scholes qui date de 1973. Dans ce modèle, l’actif sous-jacent est une variable aléatoire qui s’écrit sous la forme S(t) = S(0) x exp{σB(t) + (r - σ 2 /2) t } avec s le paramètre de volatilité, S(t) la valeur de l’actif au temps t (ainsi S(0) est la valeur aujourd’hui), B est le mouvement brownien (la variable aléatoire B(t) est gaussienne de moyenne nulle et de variance égale à t). Conclusions h On a montré sur des exemples simples qu’intro- duire un modèle mathématique permet de comprendre en profondeur des phénomènes complexes. De plus, les modèles probabilistes sont les plus à même de le faire. h Le modèle de Black et Scholes est adopté par tout le monde mais il est faux statistiquement et il est souvent utilisé d’une manière incohé- rente. Toutefois, il manque d’alternative crédible même si de nombreuses adaptations ont été proposées. Ce qui justifie son usage intensif. h Il apparaît clairement dans les exemples précédents qu’un modèle mathématique est une représentation très simplifiée et parfois simpliste de la réalité. En aucun cas il ne peut s’y substituer. Le modélisateur doit laisser une distance entre la théorie et le monde réel, ce qui est le propre de ceux qui ont été formés par la recherche. Eléments de modélisation financière Article > Pierre VALLOIS

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