ALS - Magazine 1 - Décembre 2009
atmosphère de Jupiter) vont dans le même sens : le Soleil a une composition isotopique en azote très différente (appauvrie d’environ 40% en 15 N, le deuxième isotope stable de l’azote) de celle de la Terre, de Mars ou des météorites. La Terre serait donc une anomalie pour sa composition isotopique de l’azote dans le système solaire (puisque l’essentiel de la matière du système solaire est dans le Soleil). Nos travaux les plus récents montrent que ceci semble en fait être le cas pour tous les principaux éléments légers volatils H, C, N et O (Fig5). L’origine de cette différence fondamentale entre les planètes telluriques et le Soleil devient aujourd’hui une question essentielle. Une des possibilités qui est en train d’être testée est que le Soleil lors de sa formation aurait pu irradier le gaz de la nébuleuse environnante et y provoquer une certain nombres de réactions nucléaires et photochimiques qui auraient fait évoluer la composition du gaz à partir duquel les planètes commençaient à se former quelques millions d’années plus tard. A l’inverse du vent solaire, qui donne peut être une image de la composition du gaz de la nébuleuse dans les zones internes, les comètes sont théoriquement des témoins des zones externes du système solaire, peut être moins bien mélangées physiquement, et dans lesquelles aucun processus de haute température n’a pu se produire. Le 15 janvier 2006, la capsule de la mission NASA Stardust (Fig 7) ramenait sur Terre environ 10 000 grains de taille comprise entre ≈ 1 et ≈ 300 µm collectés dans la queue de la comète 81P/Wild 2. Le CRPG faisant partie du «Preliminary Examination Team (PET)» a reçu durant le premier semestre 2007, plusieurs fragments d’aérogel contenant des traces bulleuses faites de fragments de grains et de leurs produits de réaction avec l’aérogel (Fig 7) ainsi qu’une particule terminale (un fragment de grain) de ≈ 25µm de diamètre. Les observations et les analyses faites lors du PET au CRPG (concentrations en He, Ne et Ar, compositions isotopiques du Ne et de l’O) ont montré deux choses importantes : • une partie des volatils des grains cométaires se sont dégazés lors de l’impact et ont été piégés sous forme de bulles dans l’aérogel • des grains formés à haute température (silicates réfractaires, olivine, pyroxène) étaient présents dans le noyau de la comète Wild 2. Ces deux observations impliquent qu’en fait parmi les matériaux de base qui ont servi à former les comètes se trouvaient des grains qui ont été condensés à haute température à proximité du Soleil, de l’ordre de 0,06 unité astronomique (1 unité astronomique étant la distance entre la Terre et le Soleil), et que durant leur séjour proche du Soleil ces grains ont accumulé des éléments volatils implantés sous irradiation par le Soleil jeune. Ces grains ont ensuite été transportés à plus de 50 unités astronomiques, dans la région de formation des comètes, ce qui implique l’existence de processus de transport à très grande échelle dans le disque d’accrétion solaire. Fig 1 : Photo en fausses couleur par microscopie électronique à transmission d’un grain de silicate provenant d’un sol lunaire échantillonné par la mission Apollo 11. La couche jaune de ≈ 50 nanomètre d’épaisseur est en fait amorphe. Elle a été amorphisée à la suite de l’implantation du vent solaire pendant plusieurs centaines de millions d’années à la surface de la Lune. C’est cette couche qui contient les ions du vent solaire et qui peut être analysée sélectivement par profil en profondeur avec une sonde ionique. Crédit : Y. Langevin IAS Fig 2 : Profil de la composition isotopique de l’azote (le rapport 15 N/ 14 N) et de l’hydrogène (rapport D/H) et des concentrations en N et H mesuré par sonde ionique dans un grain du sol lunaire de la surface du grain vers la profondeur. Vers 50 nanomètres de profondeur est présent de l’azote qui a une composition isotopique appauvrie en 15 N de ≈ 250 ‰ par rapport à la surface. Cette composition est celle du vent solaire implanté à cette profondeur. Ce grain contient d’ailleurs de l’H solaire que l’on identifie du fait qu’il ne contient pas de deutérium (rapport D/H plus bas de ≈ 900‰ par rapport à la valeur terrestre de référence), le deutérium ayant été brûlé par des réactions nucléaires dans le Soleil lors de sa formation. Crédit : CRPG Fig 3 : Vue d’artiste du satellite NASA Genesis entre le Soleil et la Terre avec ses collecteurs de vent solaire ouverts. Crédi t: NASA-JPL Fig 4 : Retour mouvementé le 8 septembre 2004 dans le désert de l’Utah pour la capsule de la mission Genesis dont les parachutes de rentrée ne se sont pas ouvert. Malgré tout, certains des collecteurs sont presque intacts et tous leurs fragments ont pu être récupérés et partiellement nettoyés car le vent solaire est implanté à quelques dizaines de nanomètres sous la surface. Crédit : NASA-JPL Fig 5 : Diagramme montrant les variations des compositions isotopiques de l’N (rapport 15 N/ 14 N) et de l’hydrogène (rapport D/H) du Soleil (déterminé grâce à l’analyse des collecteurs de la mission Genesis) et des autres corps connus du système solaire. Les variations isotopiques de l’azote dans les corps du système solaire, combinées à celles du rapport deutérium/hydrogène (D/H), montrent que tous les objets autres que les planètes géantes sont anormaux. En effet, les planètes terrestres, les météorites et le comètes présentent des enrichissements marqués en isotopes lourds 15 N et D par rapport à la nébuleuse originelle (caractérisée le Soleil et par le gaz du milieu interstellaire de la galaxie). Ces enrichissements sont sans doute les témoins des processus ayant conduit à la formation du système solaire, qu’il faut maintenant décrypter. Crédit : B. Marty CRPG Fig 6 : Fragments des collecteurs de Genesis dans la chambre d’analyse au CRPG (la taille des fragments est subcentimétrique) Crédit : CRPG Fig 7 : Vue d’artiste du satellite de la mission NASA Stardust se rapprochant de la comète Wild 2 et échantillonnant les grains de poussières qui s’échappent de la comète. Crédit : JPL-NASA Fig 6 ALS Mag / 25 Fig 5 Fig 7
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